« DÉLIVRÉ »

Dans le fond d’une vallée élevée du Jura vaudois se trouvent un certain nombre de maisons disséminées, habitées par des industriels et des campagnards. C'est là que demeurait, en 1897, un jeune homme de 28 ans, plein de vie et de santé, mais qui était resté jusqu'alors complètement étranger au salut et à la vie de Dieu. Comme ses parents et ses voisins, il n'était préoccupé que des choses du monde qui passent et qui périssent.

C'était au mois de janvier, et l'hiver était particulièrement rigoureux; aussi les bûcherons et les voituriers durent-ils momentanément suspendre leurs travaux. Notre ami fut du nombre de ces derniers. Après avoir achevé son travail de maison, il lui vint à l'idée, pour passer le temps, de lire les livres qui composaient sa petite bibliothèque. En peu de jours elle fut épuisée, mais il eut soin de laisser intentionnellement de côté le Livre des livres, la Bible, qui paraissait ne lui offrir aucun attrait.

«Pourtant », se dit-il, « ce gros volume renferme peut-être des choses intéressantes » ; et il se mit à l'ouvrir à l'aventure. Ses yeux tombèrent sur le chapitre 27 du livre du Deutéronome, qu'il lut en entier. Mais à peine eut-il terminé sa lecture qu'il referma sa Bible, le cœur rempli d'effroi: il venait pour la première fois de considérer, comme dans un miroir, l'état de son âme devant Dieu.

« Je suis maudit de Dieu », pensa-t-il, « certainement je suis perdu! » Au même instant d'autres passages de la sainte parole de Dieu, qu'il connaissait dès l'enfance, se présentèrent à lui avec force, confirmant encore à son esprit ces terribles réalités. Il avait entendu parler des enfants de Dieu: « Oh! que je voudrais être aussi un enfant de Dieu », se disait-il, «mais ma part est maintenant dans les tourments éternels! »

Dieu lui-même, par sa parole vivante et opérante, venait de parler dans le profond de son cœur, et sa voix solennelle avait été entendue: « Bientôt tu devras me rencontrer », ajoutait-elle, « et tu le sais, après la mort suit le jugement. »

Oh! quelle angoisse extrême remplissait maintenant son cœur ! Son entourage ignorait ce qui se passait en lui. Seule, la nature dépouillée et froide semblait s'associer à la position du malheureux jeune homme.

Un certain temps s'étant écoulé, il se dit : « Je veux m'assurer encore une fois des choses que j'ai lues, il faut que je sache si vraiment tout est comme je me le rappelle. » Pendant ce temps-là, il s'était efforcé de marcher honnêtement, de ne faire tort à personne, de rendre même le bien pour le mal; mais notre pauvre ami ne tarda pas à découvrir que le péché était attaché à lui et qu'il n'était pas maître de lui-même. Puis, comment faire disparaître ce malheureux passé duquel il avait honte et qui ne cessait d'être présent à sa mémoire ?

Ouvrant donc sa Bible, il y retrouve les mêmes choses, telles qu’elles étaient restées gravées dans son esprit. Immédiatement il mit le volume de côté, pénétré de pensées plus sombres encore: « Ah ! » pensa-t-il, « je ne puis supporter la vie, je suis trop malheureux; j'en finirai maintenant avec cette misérable existence. »

Désespéré, il se rend à la grange. Ses regards s'arrêtent sur une corde; il la prend, la fixe à une échelle, fait un nœud coulant, y passe sa tête. Dans cet instant même, la voix de Dieu se fait entendre à son âme plus fortement encore et Il croit discerner ces mots: « Tu vas me rencontrer, malheureux! » Il laisse tomber la corde et se retire chez lui, en proie à un tourment dont il ne peut se débarrasser.

Deux mois se passèrent sans amener de changement dans l'état du jeune homme qui n’osait s'ouvrir à personne. Mais le Seigneur qui lui avait parlé d'une façon si puissante pour lui révéler son état de pécheur, voulait aussi l'amener à comprendre que rien au monde n'était capable de le délivrer. Un jour ce cri sortit de son cœur angoissé: «Misérable, que je suis, qui me délivrera ? » Ce cri se trouve dans le gros livre qu'il avait naguère méprisé (Romains 7;24.) La réponse est là aussi; elle ne se fait pas attendre, et le Seigneur allait la donner à notre ami sans l'instrumentalité de qui que ce fût, réponse douce qui est comme une pluie abondante sur une terre altérée.

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Sous un souffle printanier la nature engourdie renaissait à la vie; les oiseaux commençaient à l'égayer de leurs chants, et les campagnards reprenaient leur annuel labeur. Chargé encore de son lourd fardeau, notre ami cheminait lentement pour aller à son travail. Personne n'était auprès de lui, sauf Celui qui des semaines auparavant, avait parlé à sa conscience pour le réveiller, et maintenant qu'il avait appris la pénible leçon de ce qu'il était en tant que pécheur devant Dieu, coupable et incapable de s'améliorer, le Seigneur vint parler de paix à son âme et lui accorda la précieuse jouissance du salut. Ah! quelle bénédiction appréciable !

C'était le 23 avril, jour à jamais mémorable pour ce cœur angoissé. Ses pensées détournées de lui-même, s'arrêtèrent sur Celui qui dit : « Voici, je suis l'Éternel, le Dieu de toute chair; quelque chose est-il trop difficile pour moi ? » (Jérémie 32;27). Celui qui adonné son Fils unique pour le salut du pauvre pécheur, dirigea les regards de cette âme anxieuse sur Lui-même. Comme l'Israélite mordu par les serpents brûlants regardait au serpent d'airain pour être guéri, ainsi le pécheur qui porte les yeux sur Celui qui s'est donné en rançon pour nous, trouve anssitôt1a délivrance. Élihu le dit à Job dans l'angoisse de son épreuve : « Délivre-le pour qu'il ne descende pas dans la fosse: j'ai trouvé une propitiation» (Job 33;24.) C'est Celui qui a le droit de condamner qui le dit. La nature entière, naguère si triste, mais transformée par un brillant soleil, qui versait sur elle lumière et chaleur, semblait prendre part à la joie du pécheur qui venait de trouver en Dieu son Sauveur. Le soleil infiniment plus glorieux qui brillait dans son âme, était le « Soleil de justice » qui allait transformer son existence.

Il avait gardé pour lui-même son angoisse et son désespoir, ayant réussi à cacher à ses proches même, ses exercices de cœur; mais allait-il en agir pareillement maintenant qu'il était si heureux ? C'était impossible: le soir de ce jour, à son retour à la maison, il eût soin de réunir ses parents pour leur faire connaître ce que le Seigneur avait fait pour son âme. Comment ne pas parler à tous de l'amour de Dieu manifesté en sa faveur et du pardon dont il venait de jouir ?

Il ne s'arrêta pas là; pour lui-même il désirait en savoir davantage, et comprendre, par les Écritures, comment Dieu avait ainsi pu pardonner à un misérable pécheur tel que lui. N'ayant plus peur d'ouvrir sa grosse Bible, il y trouva des passages réconfortants comme ceux-ci: « Dieu a tant aimé le monde, qu'Il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en Lui, ne périsse pas, mais qu'il ait la vie éternelle » (Jean 3;16). « Celui qui n'a pas connu le péché (le Seigneur Jésus-Christ), Il l'a fait péché pour nous, afin que nous devinssions justice de Dieu en Lui » (2 Corinthiens 5;21). « Car Dieu a constaté son amour à lui envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous » (Romains 5;8). « Car vous êtes sauvés par la grâce, par la foi, et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu; non pas sur le principe des œuvres, afin que personne ne se glorifie» (Éphésiens 2;8). « Crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé, toi et ta maison » (Actes 16;31.)

Désormais ce livre qu'il avait méprisé d'abord et abandonné, la Bible qui lui parla de la grâce de Dieu et d'une bénédiction pour l'éternité, devint pour ce jeune homme passé de la mort à la vie, la nourriture journalière de son âme, ainsi que la lumière qui brillait sur son sentier, guidant ses pas dans le chemin de la vie, et fournissant les instructions nécessaires pour que l'on ne se fourvoie pas.

Et maintenant, où en êtes-vous, lecteurs de ces lignes ? Vous avez sans doute la Bible entre les mains, ou bien vous pouvez l'avoir si vous le voulez. Lisez-la avec prières ; et puisse cette parole vivante et opérante, plus pénétrante qu'aucune épée à deux tranchants, être en bénédiction à votre âme! Elle est la parole du Dieu vivant. Combien merveilleuse est la grâce riche et puissante qui s'y trouve! Le Seigneur cherche les pécheurs, les sauve, les rend heureux maintenant et pour toujours. Puissiez-vous connaître ces choses, tandis qu'il en est temps, et, comme notre ami, jouir de la délivrance !

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Auteur inconnu